Sculpteur, chasseur et conteur né à Kuujjuarapik (Nunavik) en 1911 – mort à Inukjuak (Nunavik) en 2007.
Johnny Inukpuk est né en 1911 à Kuujjuarapik, un village du Nunavik situé sur la rive orientale de la baie d’Hudson. Il grandit bercé par les récits de la vie passée de son père Juani Inukpuaq à Itivik, la région de la baie d’Ungava. Il passe sa jeunesse à Tasiujaq, près de Kuujjuarapik, où il côtoie les Cris : Kuujjuarapik, bien que majoritairement peuplé d’Inuits, est limitrophe du village cri de Whapmagoostui. Johnny Inukpuk pratique d’abord la chasse : lemmings, renards arctiques, morses, ours polaires ; et il gagne sa vie en vendant des peaux de renards, des œufs de canard et des oies. Ses talents de chasseur et de trappeur lui valent d’être à la tête d’un campement dans les années 1940.
Si Johnny Inukpuk est aujourd’hui considéré comme un sculpteur de première importance, voire comme l’un des précurseurs de l’art inuit contemporain, ce n’est pas par vocation qu’il se tourne vers la sculpture : c’est pour subvenir aux besoins de sa famille qu’il troque ses sculptures, notamment avec les membres du navire postal britannique Nascopie avant que ce dernier ne s’abîme près de Cape Dorset (auj. Kinngait), au sud de l’Île de Baffin, en 1947 ; il vend ses sculptures d’abord librement, puis dans le cadre des coopératives. Installé à Inukjuak dans les années 1950, il est vivement encouragé dans sa pratique de sculpteur par l’artiste, auteur et cinéaste James Houston, dit « Saumik » (« Le Gaucher ») parmi les Inuits : ce dernier encourage chez les Inuits l’artisanat et l’esprit d’entreprise, voies de leur indépendance. La reconnaissance de l’œuvre de Johnny Inukpuk, essentiellement inspirée par la vie quotidienne et la pratique de la chasse, survient rapidement : dès 1951, le Groupe Financier Banque TD acquiert sa sculpture Hunter (1951) ; en 1953, ses œuvres font partie de l’exposition « Eskimo Carvings » présentée à la galerie Fils à Londres ; dans les décennies suivantes, elles entrent dans les collections d’une dizaine d’institutions importantes, comme le musée Glenbow (Calgary) ou la Maison de la Baie d’Hudson (Winnipeg) et sont l’objet de plusieurs expositions temporaires. Elles circulent aussi par le biais de catalogues, tels que Johnny Inukpuk R. C. A. : exposition. Johnny Inukpuk R. C. A. : exhibition (1987), catalogue d’une exposition de la Galerie Le Chariot (Montréal), ou Inuit 1993 : contemporary Inuit art from the Canadian Museum of Civilization. L'art inuit contemporain au Musée canadien des civilisations (1993). Johnny Inukpuk est élu membre de l’Académie royale des arts du Canada en 1978.
Johnny Inukpuk a aussi un goût affirmé pour l’activité de conteur. Il trouve d’abord à l’exprimer au moyen des arts plastiques : c’est par sa seule et unique gravure, intitulée A true story of Johnny being attacked by three polar bears while in his igloo (1974) qu’il choisit de raconter une anecdote de chasse l’ayant confronté à trois ours polaires. On lui connaît ensuite au moins deux publications : « Tongak : créature mythique aux yeux de lynx », parue dans La pierre raconte : Sculptures de stéatite du Nouveau-Québec et du Kenya. Stories in Stone : Soapstone Sculptures from Northern Québec and Kenya (1988) et « Voyage à Itivik en traîneau à chiens. A Dogteam Trip in Itivik », récit d’une anecdote héritée de son père, paru dans la revue Tumivut en 1995. Notons enfin qu’il compose de la musique et chante aux côtés du musicien Charlie Adams et qu’il contribue à un album de ce dernier, Inuit Songs Composed and Sung by Charlie Adams of Inoucdjouac Québec, produit dans les années 1970.
La polyvalence artistique et les qualités de chasseur de Johnny Inukpuk lui valent l’estime de sa communauté ; il apparaît dans le film Inuuvunga - Je suis Inuk. Je suis vivant. Inuuvunga – I am Inuk, I am alive (2004) produit par l’Office national du film.
Johnny Inukpuk, époux de Mary dont le bec-de-lièvre caractérise toutes ses sculptures de femme, est le père de deux sculpteurs, Charlie et Daniel. Les œuvres du père et des fils sont mises à l’honneur par l’exposition « Tumivut, Traces of our footsteps », organisé à Montréal en 2001 par l’Institut culturel Avataq.